Texte humoristique: quiproquo


Quiproquo

-Salut !
-Salut !
-Ca va ?
-Pardon ?
-Oui, je te demande si ça va ?
-Mon ça va très bien, autant qu’un ça peut aller ; il est en conflit perpétuel avec mon surmoi. Mais pourquoi me demandes-tu ça, c’est très intime.
-Non, je voulais dire, est-ce que la vie va ?
-Et bien demandes lui. Je ne sais pas comment tu vas t-y prendre. Bon courage.
-Non, je te demande si la vie va.
-Si la diva quoi.
-Si la vie va bien ?
-La diva, bien ? Mais quelle diva ? Elle doit avoir un nom, cette petite dame. Je ne sais pas si elle va bien, je ne sais pas de qui il s’agit, je ne peux pas savoir si elle va bien. Drôle de question.
-Non, je voulais dire, est-ce que tu vas bien ?
-Oui, je vais bien, je te remercie de t’en soucier. Et toi, est-ce que tu vas mal ?
-Non, je vais bien ?
-Pardon ?
-Je vais bien.
-Tu vas où ?
-Nulle part.
-Je ne comprends pas, tu viens de me dire que tu vas bien.
-Oui, je vais bien, mais je ne vais nulle part. Enfin, si, je vais chez le coiffeur.
-Et bien si, tu vas bien quelque part.
-Vu comme ça, oui, je vais quelque part. Chez le coiffeur. Mais je vais bien.
-Oui, tu viens de me le dire. Tu vas bien quelque part.
-Et sinon, qu’est-ce que tu deviens ?
-Et bien, ce que je suis, autant qu’on peut devenir ce que l’on est. Ca na l’air de rien, mais, c’est déjà très compliqué.
-Non, je veux dire, qu’est ce que tu fais dans la vie ?
-Et bien je fais des gâteaux, des parties de carte, des châteaux de sable, quand je pars en vacances. Quelle idée ! Et toi, qu’est ce que tu fais dans la vie ?
-J’ai fait le Maroc, le mois dernier.
-C’est un nom de gâteau.
-Non, c’est un pays.
-Tu l’as fait tout seul.
-Non, j’étais avec ma copine.
-Et, vous l’avez fais en combien de temps ?
-En deux semaines.
-J’en connais un qui doit être jaloux.
-Qui ça ?
-Et bien Dieu, voire, la civilisation orientale. Pour construire un pays en deux semaines, il faut se lever de bonne heure. On ne dirait pas, mais tu dois être sacrément volontaire.     
-Oui, c’est vrai, j’ai fait la Roumanie aussi.
-Mais tu as quel âge, tu ne parais pas si vieux.
-J’ai vingt ans.
-Tu n’as que vingt dents. Tu devrais aller voir un dentiste, ce n’est pas normal. A moins que tu te sois cassé des dents, en construisant le Maroc.
-Non, je disais que j’avais vingt ans.
-Oui, c’est vrai, c’est un peu ventant de dire qu’on a fait le Maroc.
-Je l’ai fait, le Maroc, je te jure. Je te jure aussi que j’ai vingt ans. Je ne me vante pas.
- Heureusement que tu ne te vends pas. Sauf si tu as besoin d’argent, mais quoiqu’il arrive, si tu te vends, tu ne pourras pas récolter l’argent. Je te le déconseille. C’est une très mauvaise idée.  
-Non, tu ne comprends pas, je ne veux pas me vendre, je ne veux pas m’en venter.
-Oui, tu as raison, il n’y a pas de quoi se venter de vouloir se vendre. Il n’y a pas de quoi se venter tout court. On est bien peu de choses. Même le vent ne se vente pas lui-même. Cela voudrait dire qu’il utilise un éventail. Quelle  idée saugrenue. Sot, gros et nu. Je plains cet homme que je ne connais pas.   



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